Quel mois de juin ! Ponctuant une longue série de commémorations depuis la sanglante bataille de la Moskova, le 7 septembre 1812, jusqu'à la formidable campagne de Belgique, la reconstitution de la bataille de Waterloo va attirer un large public. Bien entendu, il ne s'agit pas de célébrer une triste défaite. Encore moins de pratiquer l'auto¬flagellation en revenant sur les responsabilités, forcément partagées, du terrible fiasco. Ce qui importe, c'est que ce point d'orgue mette en avant une période essentielle de notre histoire. Tant mieux si le nom de Waterloo est dans toutes les bouches. C'est préférable à l'oubli et cela renforce l'intérêt pour une période qui n'est plus jugée digne d'enseignement dans nos collèges et lycées.
Mais notre propos va bien au-delà puisqu'il vise à apporter, au-delà des modes et des anniversaires, une vision plus large à un public de passionnés et de connaisseurs. Où donc, aujourd'hui, serait-il possible, en dehors d'ouvrages savants, de redécouvrir l'étonnante histoire de la campagne de Syrie de 1860-1861 (page 14) sans laquelle il est difficile de comprendre l'influence française au Moyen Orient ? Qui, de même, s'intéresse encore à la défaite de l'armée de Mac Mahon à Beaumont-en-Argonne (page 54), prélude des terribles revers de Sedan et Metz ?
"Traditions" ne se préoccupe pas seulement de l'histoire de ces campagnes puisque notre revue s'ouvre aussi aux lieux de mémoire, aux hommes et à leur équipement. Qu'il est intéressant de découvrir, sur la base d'un simple portrait, tels Joseph Chopard (page 38) ou encore Peter Everard Buckworth (page 44), le parcours de l'un de ces soldats sans lesquels ces campagnes n'auraient pu avoir lieu. Ou des unités auxquelles ils appartenaient, qu'elles soient éphémères comme les gardes constitutionnels de Louis XVI (voir page 80), ou prestigieuses à l'image des hussards russes qui servirent sur de nombreux champs de bataille européens (page 89).
Avec une passionnante étude sur le fameux pantalon garance (page 64), ce numéro aborde un aspect surprenant de l'équipement de nos militaires. En présentant le sabre de hussards de 1786 (page 74), il montre également les raisons parfois banales qui expliquent l'évolution de l'armement.
Si nous sacrifions tout de même à 'actualité avec notre couverture, ce n'est pas vers Mont-Saint-Jean que nous tournons notre regard mais vers le carrefour des Quatre-Bras (page 23) où, deux jours avant le 18 juin, se joua sans aucun doute le sort de la bataille de Waterloo. Napoléon avait bien perçu l'enjeu de cette position mais il ne pouvait être partout. En Corse, dont il est originaire, l'Empereur vaincu reste évidemment dans toutes les mémoires et plusieurs monuments lui rendent hommage (page 50).
Avec ces articles de fond, ce deuxième numéro de "Traditions" est déjà bien riche. N'oublions pas aussi toutes les rubriques thématiques, désormais habituelles, qui complètent la lecture et permettent d'explorer d'autres facettes autour des thèmes qui nous sont chers.